MENAGER

 

Ta main furète dans ta poche, rencontre la couture que je sens à mon 

tour. Elle nous lie sans un mot. L’odeur de lessive de ton tablier a toute

l’ardeur de marquer le jour ouvrier. Je me hisse aux rayures du tissu,

jusqu’à ton visage ; je respire à ta place, tu retiens la joie du jour miraculé

que quelques boutons modestes pressent contre ta poitrine.


In Osiris n°90, 2020


PARTOUT AILLEURS, extraits


On travaille dans le pays, ôtant rails et traverses. On charge le ballast au soir, dans les sacs en toile, avant d'aller dormir. Les chemins défaits rêvent alors de trains. Pendant le sommeil, les rues partent en direction du foyer, délaissant les bleu de travail inflammables à la frontière, pour la couleur de la rose, le bonheur de l'oubli.


Les promesses de retour se multiplient, jusque tard dans la nuit. Venues du port par le bateau français, elles gravissent les coteaux couverts d'étoupe. Elles glissent dans le bassin rocheux, entrent dans la chambre du mourant. Promettre de revenir un jour est une trahison, une pierre qui retombe.


In Partout ailleurs, p.isage intérieur, 2018

Une lecture de Dominique Boudou : ici dans Recours au Poème. 



RIEN

 

Le volet replié dans le ciel d'où croule un feuillage

comme l'air, les bruits lointains après le ressac

et la terre affluant comme une mer pour l'alité,

 

lui garde les yeux levés, scrute la mécanique du mouvement

la couleur identique varie, la chambre tient dans le cœur

dehors est une chambre où la fièvre lave le rien qui nous excuse.


In Mode mineur (à paraître, début 2026)

AU SOIR


 

Pourquoi viens-tu me surprendre en plein jour ?

La lumière sursaute, dans le coin d’une pensée

je te suis, les yeux retournés. Sans un mot,

je te donne des nouvelles, tu réponds dans la langue

d’un temps. J’articule quelques syllabes

du dedans, de celles qui s’amarrent et permettent

d’entrer dehors, à nouveau. Je te poursuis,

leurré, le soleil te happe, mais c’est

l’éclairage d’une lampe haute. Je lis donc à la nuit

tombée. Passent ton visage, le vent dans tes cheveux ;

l’image rassemble ses reliefs.


RENTRER

 

Quand je rentre de ma leçon,

je ne fais pas le même chemin. Je m’égare souvent,

au risque de me perdre. Ma consolation

est ce que j’ai appris et que je me répète

jusqu’à l’épuisement.

 

L’autre leçon est celle du ressac en moi

qui de son écume blanchit mes cheveux.


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