C’étaient, au port, tes bras
repliés et tes mains sur la nuque.
On ne voyait que tes coudes que
tu articulais comme le Bec-en-sabot
de Copenhague.
C’était ton amitié libre ; dans les bureaux,
sur la mer calme, on négociait cent fois.
C’étaient, au port, tes bras
repliés et tes mains sur la nuque.
On ne voyait que tes coudes que
tu articulais comme le Bec-en-sabot
de Copenhague.
C’était ton amitié libre ; dans les bureaux,
sur la mer calme, on négociait cent fois.
La lucarne s'éclaire, la maison se soulève.
Dans l'odeur de talc fougère, les mains
ménagères fabriquent le pain de l'air.
La lampe du plafond fait voler des cercles de couleurs
et des arcs brisés et les voix aux airs latins s'amenuisent
à mesure que le lieu se retire.
C'est elle qui, tout en m'apercevant, jette
aux chats chétifs un morceau de pâte, soucieuse
de rester encore, ici-bas. Je la reconnais, léger sur la neige mère,
en moi.
Les pierres montent une à une
devant la mer et la mer a reconnu
le littoral ; la mer grommèle, la mer
respire pour lui. Le souvenir la garde,
la mer colère, la mer aimée ; la mer
ne voit que le prisonnier fou à lier, à aimer
à haïr, la mer essore, la mer se terre, la mer.
On couche le cheval sur un grand drap, on prie
un peu en injuriant la terre où tombe le regard,
la mer laboure, les paysans rentrent.
L’aube se lève.
Sur la
neige qui sépare
blanchit
le lièvre variable,
sa stupeur
fait une tache de sang
que fige
l’éblouissement.
La lucarne s'éclaire, la maison se soulève.
Dans l'odeur de talc fougère, les mains
ménagères fabriquent le pain de l'air.
La lampe du plafond fait voler des cercles de couleurs
et des arcs brisés et les voix aux airs latins s'amenuisent
à mesure que le lieu se retire.
C'est elle qui, tout en m'apercevant, jette
aux chats chétifs un morceau de pâte, soucieuse
de rester encore, ici-bas. Je la reconnais, léger sur la neige mère,
en moi.
in Carte de séjour, à paraître en 2025.
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Crédit photo : Marianne Gioia |
La tache de café, dans le cahier, date de l'année où tu
vins t'installer dans cette vaste maison cueillie par le
verger de l'Ardèche. Les pêches mûres au bout des branches
arquées n'étaient pas cueillies - Ton arrivée signait le départ.
Je lisais entre les lignes de chaque page ton avenir plein
d'errances, jusqu'à ce que je boive cette eau noire dont l'oeil
maintenait deux solitudes : la mienne me rendit gauche et je
renversai ma tasse ; tu vins chercher un poème de secours.
La carapace d'acier retient le râle du moteur, on s'affaire
sans prière, bras et mains s'agitent à l'unisson, la parole
en moins. Enchaînées au devoir, sous la lumière des fenêtres
hautes, les blouses rythmiques et bleues, traversées par un rai
de poussière dansante, actionnent des roues dont le goût de fonte,
mêlé à la salive, est la raison de déglutir. La gueule béante
libère de petits trains de cartons prêts pour l'expédition, un tapis
rotatif les entraîne. Les machines parlent mieux que quiconque.
à ma mère
Les flocons, sur le lac, font encore tomber ses larmes, c'est
déjà demain avec son cortège improbable qui arrive
du désert : ce n'est plus hier, seules les chansons sont
tristes si elles se retournent. Le lac gelé, c'est donc que
le froid s'est épris de l"insaisissable, la glace empêchera
l'ascension du plongeur en apnée. Pour apaiser le lac, un peu
moins de chagrin serait le mieux pour réduire la taille
du monstre résigné qui s'abîme, peu à peu, dans la fleur blanche.
Le fuseau de ta main tresse l'air, revient accidentellement
au bord de la tasse. L'après-midi fleurit sur la porcelaine,
l'été est généreusement anglais, deux ou trois doigts courent
sur ton menton, se rassemblent pour allumer une cigarette.
Je te vois en détails devant la flamme, tu t'éloignes derrière
le nuage. Ta mimique conclut le dilemme du plaisir et de son
contraire. Une mèche se noue autour de ton doigt dressé vers
le haut. Il n'y a de hauteur que l'impatiente réconciliation.
Andrea et Robert Moorhead publient le nouveau numéro d'Osiris qui, cette année, fête son cinquante-deuxième anniversaire.
En voici le sommaire :
Pourquoi viens-tu me surprendre en plein jour
alors que je pratique l'art sans talent de la
disparition. En ce jour de nuit restante, ta pensée
me réjouit, je la poursuis et me rends compte
que je m'évapore un peu plus dans le moins.
Ce sont ces deux pôles qui éclairent ma raison
de m'éteindre : la lumière augmente, aussi chère
qu'un vacarme qui s'éloigne. Pourquoi viens-tu.